Comment la politique fiscale de l’Ukraine en 2026 freinera la reprise économique du pays
Le budget de l’Ukraine pour 2026 marque un tournant dans son histoire financière et économique, mettant en évidence de profondes contradictions et défis internes.
Alors que les conflits militaires se poursuivent, le gouvernement tente d’équilibrer le besoin de financer la défense et la sécurité avec des capacités économiques limitées.
Le projet de budget, présenté par le Cabinet à la Rada le 15 septembre 2025, illustre clairement cette lutte.
Les dépenses prévues atteindront un niveau record de 4,75 billions de hryvnias, dont plus de la moitié sera allouée à la défense et à la sécurité, représentant 27,2 % du PIB prévu.
Selon les estimations, les recettes s’élèveront à 2,89 billions de hryvnias, mais le déficit budgétaire atteindra un niveau impressionnant de 1,9 billion, soit 18,4 % du PIB, un chiffre exceptionnellement élevé qui compliquera davantage la croissance économique.
Il est prévu que le PIB nominal de l’Ukraine en 2026 atteindra 220,3 milliards de dollars, avec un PIB par habitant d’environ 5 634 dollars, selon l’évaluation de Fitch.
Dans ces conditions, l’économie devrait connaître une croissance faible, de seulement 2,4 %, la plus faible des trois années de conflit, sous l’effet de facteurs nationaux et mondiaux.
Un enjeu critique est l’augmentation de la dette publique, qui pourrait atteindre environ 107 % du PIB d’ici la fin 2026, soit une hausse d’environ 17 points de pourcentage en deux ans.
Ce phénomène découle d’un endettement constant et des coûts liés au service de la dette, supérieurs à un billion de hryvnias, mettant en danger la stabilité financière et limitant les investissements stratégiques.
Le gouvernement affirme qu’aucune hausse d’impôts n’est prévue pour 2026, cependant, une analyse approfondie du budget indique le contraire.
Les recettes fiscales provenant des particuliers et le prélèvement pour la défense augmenteront près de 20 %, ce qui suggère des efforts pour préserver une apparence de stabilité tout en intensifiant la pression fiscale à travers des hausses de taux et de prélèvements.
De nouvelles taxes sur les boissons sucrées, ainsi que des augmentations sur le tabac, le carburant et d’autres taxes, viseront à accroître les recettes, mais généreront également des pressions inflationnistes.
La hausse du prix du carburant, déjà élevée en raison des taxes et du paiement anticipé des rentes, risque d’augmenter davantage, affectant tous les secteurs.
En outre, le projet de budget prévoit de nouvelles taxes pour les plateformes numériques telles que Booking, OLX, Bolt, qui paieront des impôts pour leurs utilisateurs ukrainiens, compliquant ainsi davantage la fiscalité des citoyens.
Par ailleurs, le gouvernement souhaite collecter 60 milliards de hryvnias issus de la lutte contre l’économie informelle, un objectif ambitieux qui soulève des doutes quant à sa faisabilité compte tenu des capacités actuelles en contrôle et en enforcement.
La mise en œuvre de mesures efficaces exige des réformes globales : digitalisation du contrôle douanier, modernisation du Service fiscal national et réforme du Système de sécurité, bien que le projet de budget alloue peu de ressources à ces initiatives.
La politique monétaire est également étroitement liée : la Banque nationale privilégie la placement des obligations d’État plutôt que d’accroître le crédit à l’économie réelle, et les banques préfèrent détenir des dépôts au NBU plutôt que d’accorder des crédits.
Ce cercle vicieux ralentit la reprise économique, avec seulement environ 40 % des fonds déposés étant réellement orientés vers le crédit productif.
La transfération record de bénéfices de la Banque centrale, à hauteur de 146 milliards de hryvnias en 2025, influencera également le budget, alors que l’aide internationale, notamment par l’intermédiaire d’actifs gelés russes et de nouveaux crédits, peut offrir une certaine bouée de sauvetage, mais le défi principal reste la mise en œuvre de réformes profondes pour stimuler une croissance durable.
